Mais, pourquoi la « Plaine des Bouchers »

Mais, pourquoi la « Plaine des Bouchers »

     Ce grand triangle mal connu de l’Ouest de la Meinau, de l’autre côté de la route de Colmar, bordé au Nord par la route de la Fédération coté ville et à l’Ouest par le canal du Rhône Rhin, fut jadis une plaine herbeuse et inondée par les crues du Rhin.

Il était une fois, le serment de Strasbourg !

     Dès l’Antiquité une route -romaine bien sûr- pavée et surélevée reliant Strasbourg à Lyon en passant par Bâle, la traverse. Dès le Haut Moyen Age, les armées s’y cantonnent, tenus à l’extérieur par la cité-Etat Strasbourg, qui y monte les défenses Sud.

Le serment de Strasbourg, le premier texte composé en français, fut prononcé sur la terre de la plaine des Bouchers en l’an 842 ! Qui penserait aujourd’hui à la bagarre entre les trois petits fils de Charlemagne qui jurèrent dans ces herbes battues par le vent de la Plaine des Bouchers, pour s’affranchir de la domination de l’ainé sur les deux « petits » rois ? Personne ! Et pourtant…

Proclamation des Serments de Strasbourg signés par Charles II, dit Charles le Chauve (823-877), roi de France et empereur d'Occident, et Louis le Germanique. ©AFP - Leemage

Ça broutait à la Plaine…. des Bouchers

     Au Moyen Age, en 1321, la ville de Strasbourg autorise les bouchers de la ville à y faire pâturer leur bétail. Ces grasses prairies s’appelleront depuis Metzgerau, qui signifie boucher. D’où « La Plaine des Bouchers ». Les troupeaux traversent pendant des siècles la porte des Bouchers, pour aller à l’abattoir situé sur les quais de l’Ill, qui aujourd’hui, abrite le musée historique.

Bétail et chevaux des armées ont, pendant des siècles, brouté l’herbe de la Metzgerau, et regardé peut-être les manœuvres d’artillerie ou autres manifestation militaires qui y étaient organisées ! En effet, ce triangle au Sud de Strasbourg devint un important poste stratégique, entre le Wighauesel (actuel station de tram Krimmeri) au Nord, et la Hohe Wart (station Hohwart) au Sud : des hauts postes de défense qui surveillent le Krimmeri à l’Est et le fossé de défense du Landwehr au Sud, à la limite avec Illkirch.

La Plaine des Bouchers en 1790, estampe de Jean-Charles Delafosse Source : BnF

     Au fil du temps, quelques propriétés et fermes s’installent peu à peu au milieu des cantonnements militaires et des troupeaux de bêtes.

En 1790, Strasbourg organise la Fête de la Fédération et institue le serment civique, inaugurant ce serment républicain, devant la foule des Strasbourgeois.es parmi lesquels se trouvaient sans doute celles qui avaient envoyé à Louis XVI leur cahier de doléances, et qui sait, peut-être le futur baron Charles Louis de Schulmeister, alors jeune homme aventurier qui sillonnait les marais bras morts et méandres du Rhin Tortu et du Fossé…

Des femmes font la cueillette au cœur de la Plaine des Bouchers Source : HERR Florence, Mémoires de la Meinau. La Flachenbourg (1703-1939), 2012

Entre initiatives locales et accidents de la grande Histoire, de terre marécageuse, militaire puis bucolique, la plaine des Bouchers se couvre d’activités agricoles, puis devient une zone d’activités économiques et de loisirs telle qu’on la connaît plus ou moins aujourd’hui !

Et maintenant, allez-vous voir cette architecture chaotique de la plaine des Bouchers avec un autre regard ?

MVG

Source : HERR Florence, Mémoires de la Meinau. La Flachenbourg (1703-1939), 2012

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