Le Saviez vous : Maria Casares

Le Saviez vous : Maria Casares

Le Saviez vous : Maria Casares

Un nom de rue à la Meinau porte ce nom féminin, celle d’une très grande actrice du XXème siècle.

Cette rue est plutôt un chemin qui longe l’arrière de l’église Saint-Vincent-de-Paul jusqu’au Centre médico-social, reliant l’Oasis de la rencontre à la rue de la Canardière, à l’arrière de l’école du même nom.

Portrait de Maria Casares
Maria Casarès à la Comédie-Française en 1952 ©Getty - Keystone-France

Je me souviens…

Je me souviens de ce chemin pédestre et herbu quand il n’avait pas encore de nom. C’était un de ces endroits pas balisés, refuge des groupes d’ados ou passage raccourci connu des seul.es habitant.es. Un lieu « gris » où poussaient herbes folles, orties et prêles, pissenlits, arbustes et lierres grimpant le long des murs arrières des bâtiments scolaires.

Je me souviens qu’avant la rénovation, le chemin se cachait sous les buissons du côté de la rue de la Canardière.

Chemin Maria Casares, qui relie l'Oasis de la Rencontre au Centre médico-social

Je me souviens de ces femmes pressées, sac de commissions au bras, sortant du Centre médico-social, prendre à droite ce chemin pour rejoindre, vite, l’avenue de Normandie, au 31, vers l’Atelier qui y tenait une permanence sociale.

Je me souviens d’un soir de fête à Pôle Sud, avec des représentations de danse en extérieur, sur l’herbe du patio, qui longeaient le chemin séparé par un grillage. Les invités, des habitués de la culture contemporaine, se tenaient debout en admiration d’un numéro de danse poétique sous les étoiles, silencieux.

Je me souviens, intrigués par un petit bruit, d’avoir vu trois paires d’yeux écarquillés de l’autre côté du grillage. Et derrière ces yeux, trois silhouettes graciles regardaient les pas aériens des danseurs en chuchotant des « Oh » et des « Ah », et demander : « C’est de la danse, çà, tu crois ? »

Je me suis rapprochée de ces adolescentes et j’ai chuchoté : « Oui, aussi, danser c’est bondir de joie, sous les étoiles, ». Je me rappelle m’être fait réprimander par une spectatrice agacée : « Chuuuuttt ! » 

Depuis, Pôle Sud fait ses rentrées culturelles sur son parvis, et aussi à l’arrière, en lien avec le CSC Meinau, sans barrières ni grillages.

Je me souviens d’un spectacle plus récent, avec un camion fleuri : parti de l’arrière de Pôle Sud, en face du chemin Maria Casarès, qui avait entrainé derrière lui les artistes et le public pour faire le tour de la place de l’Ile de France, avec un cercueil décoré par Andrea Mindre : sa performance s’inspirait de danse africaine. Ce 13 juin 2018, fut un moment d’émotions et de mémoire pour les spectateurs et habitants aux fenêtres des immeubles. Emotion qui n’aurait pas déplu à Maria Casares, cette actrice tragédienne et grande amoureuse du peuple, d’Albert Camus et de l’art théâtral.

Je ne sais pas qui a donné ce nom de Maria Casares à ce chemin de traverse mais à découvrir sa biographie, c’est pas mal trouvé. Jugez en par vous-mêmes, il y a peut-être un lien…

Maria Casarès photographiée par le studio Harcourt en 1944
Maria Casarès photographiée par le studio Harcourt, 1944

Maria Casares, « Résidente privilégiée »

Maria Casares est une actrice française d’origine espagnole, Elle est née à La Corogne (Galice), le 21 novembre 1922, dans une famille fortunée, cultivée, ardemment républicaine et francophile. Son père, Santiago Casarès Quiroga, a connu la prison, puis fut ministre lors de la 1ere République espagnole proclamée en 1931, et puis, à nouveau, la guerre civile vint et jeta sa fille Maria hors des années de son enfance heureuse. Son caractère se trempe dans cette période capable, dit-elle, de « gorger une vie entière ».

Exilée en France avec sa mère en 1936, elle ne reverra sa patrie que quarante ans plus tard. « Résidente privilégiée », c’est le titre de son livre de souvenirs, elle a aimé sa terre d’exil, qui le lui a bien rendu.

Elle entre au Conservatoire national d’art dramatique, et plus tard, triomphe dans des rôles de tragédienne.

« Ma patrie est le théâtre ! » affirmait-elle. Mais son parcours fut surtout celle d’une combattante. Elle fut, aussi l’amoureuse de l’ombre d’Albert Camus.

– « J’attends le miracle toujours renouvelé de ta présence » (Albert)

– « Tu es mon équilibre, l’épaisseur du sang et des rêves, la vérité qui me nourrit ».[1]

 

Maria Casarès doit être bien contente de voir se blottir dans son chemin discret les amoureuses et amoureux de la Meinau d’aujourd’hui…

[1] Albert Camus et Maria Casarès, Correspondance. 1944-1959. Gallimard, 1 270 p.

Mvg

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